Make Me Feel Safe

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Après presque deux mois d’absence, je reviens sur le devant de ma toute petite scène, pour discuter de l’invisibilité des personnes trans-masculines. Sujet délicat s’il en est.
Je tiens d’ailleurs à signifier que je n’ai pas réellement rien fichu pendant ces deux mois, mais c’est un résultat surprise que je vous réserve pour plus tard.

Aujourd’hui donc, nous allons essayer ensembles (surtout moi), de comprendre pourquoi les garçons trans ont si peu de visibilité face aux femmes trans.
Et avant toute chose, je rappelle que cet avis n’engage pour le moment que moi, et que le contenu de cet article sera théorique avant d’être pratique.

Mise en Contexte

En grandissant, j’avais plus ou moins pleinement conscience que quelque chose n’allait pas chez moi. Je l’ai déjà évoqué par le passé, j’attribuais ce malaise généralisé à tout un tas de choses, et notamment mon poids.
Pourtant quand j’étais petit, je n’étais pas encore gros (j’ai vérifié sur les photos). Mais les autres enfants s’acharnant tellement à me le faire comprendre, j’ai fini par l’intégrer.

Par la suite, j’ai tout construit autour de mon orientation sexuelle, que j’ai moi-même cloisonnée pour assurer des fondations solides. Mais ce n’est qu’en rencontrant d’autres garçons en situation de transition que j’ai réussi à comprendre. Non pas que cela me concernait, mais que cela existait, avant toute chose. Pour moi ce fut une révélation : il est possible de transitionner dans les deux sens du spectre masculin-féminin.
Ça parait idiot, mais à l’époque ça a pété les fondations de mon existence à la masse de chantier.

Les personnes trans féminines sont très visibles, et éclipsent presque les personnes trans masculines. On n’en entendais quasiment jamais parler, avant l’ère du Saint Internet, et ce n’est finalement que depuis moins de 10 ans, avec l’explosion de YahourTube, que les mecs trans sortent de l’ombre. Ils existent pourtant depuis aussi longtemps que leurs consœurs, avant même la modernité du traitement hormonal et des chirurgies, il y a plein de livres sur le sujet.

Alors, pourquoi ce silence pendant si longtemps?

Argumentation

Ce silence est, à mon humble avis, dû à plusieurs facteurs croisés. Non, aucun lien avec la personne qui t’apporte tes colis de chez la Chine.
Et il faut que j’arrête de faire des blagues, parce que je perds moi-même le fil de mon raisonnement, avançons donc.

Chaque parcours est évidemment différent, d’un côté comme de l’autre sur le spectre, mais si je dois faire des généralités, je dirais que le cispassing s’acquière bien plus vite pour les garçons que pour les filles. Tandis que les filles doivent parfois passer par plusieurs types de médication hormonale, et éventuellement faire de la rééducation vocale ; les garçons eux, quelques piqûres régulières dans les fesses et en 8 mois c’est plié.

Je grossis effectivement beaucoup le trait, mais la testostérone de synthèse étant particulièrement puissante, elle remue tout le corps en même temps, pas tout à la même vitesse, mais dans l’ensemble, les changements peuvent être très rapides.

Et cela, engendre plusieurs éléments. Je parle en généralités toujours, parce que si je commence au cas par cas, mon article va durer 8 jours, et personne ne le lira.
Plusieurs éléments donc :

1/ La visibilité sociale en tant que personne trans peut être plus longue pour les personnes féminines, de ce fait leur présence est plus facilement notable. Les personnes masculines vont plus vite tomber dans l’anonymat du cispassing.

2/ L’exotisation sociale et sociétale. On entend toute sorte de « blagues » à propos des femmes trans, rarement à propos de leurs confrères. Les « blagues » en question tournant très souvent autour du fait que les femmes trans ne sont que des pièges pour les hommes cisgenre hétérosexuels. Un peu comme si on affirmait que toutes les femmes trans sont forcément attirées par les hommes… hein?
Les seules remarques qu’on entend sur les garçons trans sont généralement faites par les TERFs.

Parenthèse de vocabulaire : les TERFs pour Trans-Exclusionary Radical Feminist, sont des « féministes » qui fondent leur mouvement sur la prétendue biologie des individus, c’est à dire que si t’es né·e avec un pénis, tu es forcément un garçon, alors que les faits leur donne tort. Elles considèrent que la transidentité est un mensonge, que les femmes trans sont des hommes en robe qui vont les agresser, et que les hommes trans sont des traîtres à la cause passés à l’ennemi (les autres hommes donc). Notez que je n’ai pas utilisé « iels », puisque les TERFs ne considèrent pas qu’un homme puisse être féministe ou au minimum un allié de la cause.

3/ De par cette potentielle attente d’un cispassing, le temps parait bien plus long pour les filles trans que pour les garçons trans. Beaucoup se tournent alors vers la communauté (trans et/ou LGBTQ+), et plus le temps passé est conséquent, plus les personnes se sentent plus ou moins redevables envers ladite communauté. Mais cette affirmation est purement théorique par contre. Je ne me base sur rien, si ce n’est mon ressenti, et un constat de loin.

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Evidemment, le militantisme constant n’est par pour tout le monde, et je conçois tout à fait que lorsqu’une personne a atteint le stade (émotionnel autant que physique) où elle se sent bien, elle lâche totalement la lutte permanente. Après tout, une personne transitionne pour être en meilleur accord avec son ressenti profond, et chacun n’a pas pour ambition de faire de son quotidien un combat pour faire valoir les droits de toute une communauté.

Et pour ce qui est du point de vue purement trans-masculin, on a très souvent grandi socialement et familialement en tant que fille, et donc été éduqué avec le principe de fermer sa gueule rester dans le cadre et s’effacer pour laisser la place de parole aux hommes. De ce fait, même après une transition, les principes qui nous ont modelés restent gravés dans notre cérébral, dans nos émotions, dans nos rapports au monde.
Certes, nous gagnons des privilèges certains, mais très souvent, nous en avons aussi pleinement conscience, et tentons de redistribuer la parole aux femmes, souvent laissées de côté dans la plupart des domaines.
Il s’avère également que la culture transféminine est bien plus ancrée dans le temps, tandis que la culture transmasculine se fait plus discrète. Il n’y a qu’à voir la quantité astronomique de (mauvais) films sur la question, beaucoup de femmes trans, très peu d’hommes trans, il en va de même à travers l’Histoire.
Du coup, cette absence de repère peut aussi participer au fait que les filles sont davantage sur le devant de la scène, par choix ou par force des choses.

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En Conclusion

Comme je l’ai élaboré, c’est un ensemble de beaucoup d’éléments, parfois hasardeux, d’autres fois très concrets. Ou peut-être que j’ai dit n’importe quoi et que je n’ai juste aucun sens de l’observation.
Il n’en demeure pas moins que les garçons trans sont bien moins visibles, au point qu’il m’est déjà arrivé au moment de préciser ma transidentité, que l’on me demande quand est-ce que j’allais commencer à me féminiser.

C’est pour cela que, même si je n’annonce pas clairement mon identité civile sur ce blog, je ne cesse de vous écrire, mois après mois, non seulement pour garder une trace écrite de mon évolution, mais aussi et surtout dans une tentative d’être éducatif dans mon parcours. Et peut-être aider à visibiliser nos existences, à mon humble échelle.

Holding myself too tight

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A l’adolescence, rien n’apparaît comme légitime, en particulier les choses sur lesquelles nous n’avons aucun contrôle.
Cet article qui s’annonce d’ores et déjà casse gueule, parlera de la quête individuelle de vérité avant l’âge adulte.
Dans ce billet, je vais tenter d’extrapoler sur le fait que les ados sont loin d’être des créatures dénuées d’intellect, et que très souvent, ils et elles détiennent déjà des indices sur ce qu’iels vivent quotidiennement, en terme de ressentis physiques et émotionnels. Lisez jusqu’au bout, la lumière fait son oeuvre.

Lorsque l’on traverse la période charnière de l’adolescence, nous sommes en proie à nos hormones, mais pas seulement. Il faut parvenir à avancer chaque jour alors que le monde entier semble contre nous, personne ne nous comprend, et surtout, personne n’essaie vraiment de le faire.
Un problème de communication? Votre enfant est juste timide. Un petit coup de mou? C’est qu’iel est fainéant·e. Des douleurs récurrentes? Pas assez de sport. Et si iel ne sort jamais de sa chambre? C’est sa crise d’adolescence.
Alors que derrière toutes ces affirmations se cache parfois une souffrance réelle, et des éléments qui pourraient éventuellement être régularisés par une aide médicale ou encore de la thérapie.

Lors de ma propre adolescence, il y a eu un paquet de signes annonciateurs de la suite concernant mon état de santé, mais tout le monde est passé à côté.
Phobie scolaire, violence, crises de colère, automutilation, j’en passe et des meilleurs. Je ne faisais pas ma crise d’ado, j’étais « juste » en profonde dépression. Et les choses n’étaient pas prêtes de s’arranger.
Je dis souvent que j’ai eu la chance d’être pris en charge suffisamment tôt par le système médical, mais j’en ai quand même pas mal bavé avant d’avoir un diagnostic. Et malgré cela, ça a été un effondrement pour ma famille. Entre la recherche de ce qui a été « mal fait », et autres « personne ne l’a vu arriver », c’était pourtant annoncé dès le départ, en regardant correctement.
Je ne blâme absolument pas ma famille, mais durant une courte période, je n’avais aucune envie de vérifier s’il y avait des réponses aux nombreux « pourquoi », je tenais juste à ce que l’on me soutienne, et que l’on s’occupe de moi.
Mais je digresse.

Je voulais juste mettre le doigt sur le fait qu’une fois adultes, lorsque nous obtenons un diagnostic, s’il y en a un à poser, c’est un soulagement, parce que beaucoup de choses prennent du sens, et plusieurs événements trouvent leur explication.
Mais jamais lorsqu’on est adolescent·e­·s, parce que personne ne nous prend au sérieux dans cette période là. Et c’est bien dommage.

De la même façon, lorsque l’on sort du modèle cisgenre-hétérosexuel, beaucoup d’événements de l’enfance prennent sens une fois adultes, si l’on n’avait pas conscience de notre éventuelle spécificité avant cela.
Tout comme à l’inverse, si l’on en a parfaitement notion de notre « différence », d’un point de vue sociétal, personne ne nous prend au sérieux non plus.
Quand votre enfant vous annonce qu’il est gay, ou transgenre, très souvent iel s’entendra dire que « ce n’est qu’une phase », et si c’est effectivement une possibilité, cela ne fait pas la majorité. En grandissant, cette « phase » prendra probablement de l’ampleur jusqu’à en devenir étouffante si l’on lutte contre.

Si je n’avais pas nécessairement connaissance de la notion de transidentité jusqu’à l’âge adulte, j’avais pourtant profondément conscience que quelque chose me gênait dans mon identité. Et le fameux « ce n’est qu’une passade », c’est à moi même que je l’ai maintes fois répété. Mais à essayer de noyer cette vérité indéfiniment, j’ai fini par me retrouver face au choix d’affronter les autres, la société, mes proches, et me révéler véritablement au monde; ou alors de mettre fin à mes jours. On a connu des décisions plus agréables.

Tout cela pour en arriver au fait que, même si lorsque l’on est ados, on est un peu stupides, un peu niais·e·s, et pas forcément éclairé·e·s sur tous les plans, nous n’en demeurons pas moins en pleine possession de notre propre vérité.
Il suffit juste de trouver les bons termes pour mettre les mots sur nos douleurs. Qu’elles soient physiques ou morales. Et de trouver des personnes possédant suffisamment de bienveillance pour nous écouter, nous aiguiller, et nous rassurer.

Prenez soin de vous.

Le cas de l’invisibilité

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Si vous me lisez depuis suffisamment longtemps, vous vous souvenez peut-être que j’avais fait une série d’articles intitulée Les Chroniques Queer, il y a un an de ça. Je parlais entre autre de la visibilité de personnes du milieu LGBT, en particulier les personnes transgenre et non-binaires, et je m’affaire sur ce blog, depuis plusieurs années déjà, à articuler une certaine forme de visibilité, parce que ça fait du bien, et que ça a une utilité « éducative » pour les gens non-concernés mais interessés par ces questions là.

Mais ça, c’est en ligne, parce que dans la vraie vie véritable, j’ai choisi d’être invisible, en jouant sur mon cis-passing*, pour être tranquille. Mais la vérité, c’est que ce n’est pas de tout repos. Je l’ai évoqué par petites anecdotes au fil de mes articles, mais aujourd’hui, celui ci y sera consacré.

Lorsque l’on est une personne transgenre, activement en transition depuis un certain temps, on acquiert ce que l’on appelle le CIS-PASSING, à savoir, le fait d’apparaître visuellement, comme une personne cisgenre. C’est à dire que si personne ne prévient votre interlocuteur·ice, iel ne pourra pas « deviner » que vous êtes trans.

Et il y a généralement deux camps dans ce cas là. Les gens qui choisissent d’être ouvertement visibles, et les gens qui ne souhaitent pas que cela se sache. Chacune de ces positions est parfaitement valide, mais je vais m’attarder aujourd’hui sur la seconde possibilité.
Déjà parce que le fait de choisir d’être « stealth » (terme spécifique, se traduisant littéralement par furtif) est lourdement critiqué par certains individus désagréables, j’y reviendrais juste après; mais aussi parce que c’est bien moins facile que l’on pourrait le croire. La discrétion, c’est un effort de tous les jours, aussi bien physiquement, que mentalement, et aussi pas mal verbalement.

Des fois j’ai l’impression d’être un infiltré chez les personnes cisgenre, surtout quand les gens ne me sont pas émotionnellement proche. Ça demande un niveau de contrôle ahurissant, sur ce que l’on dit, sur les mots que l’on emploie, ainsi qu’une paranoïa de tous les instants.
Et je me permets d’ailleurs de préciser que si j’ai utilisé le mot paranoïa, c’est que je suis intimement concerné, donc bon, la comparaison n’est pas faite à la légère.

En bref, il faut rester en alerte tout les instants, et faire constamment attention à qui nous entoure socialement pendant une conversation, même légère. Pour exemple, je discutais il y a quelques jours avec mon frère, qui évoquait mon cycle [d’humeur], dû à la prise de testostérone. Et comme sa collègue de travail était juste à coté, je m’attendais à tout instant à ce qu’elle me demande ce que c’était que cette histoire de cycle.
Pour cette raison, j’ai toujours un petit stock d’explications détournées prêtes à l’emploi, afin d’esquiver une éventuelle révélation de ma transidentité.

De la même façon, il faut très souvent altérer certaines histoires, en particulier lorsque l’on parle au passé, pour que les expériences de notre vie ne dénotent pas une notion, même cliché, du genre opposé. Typiquement, j’ai déjà porté des robes quand j’etais enfant, du coup lorsque l’on me dit que le kilt ça m’irait bien, j’explique que je déteste porter des robes. Mais je me sens l’obligation de justifier sur le comment je sais quel effet ça fait de porter des robes, après plusieurs regards interrogés, en modifiant l’aspect « quand j’etais petit » par « quand j’etais ado et qu’on voulait déconner avec des potes ».
Et c’est juste un exemple. Des fois, il faut aussi s’asseoir sur le fait de pouvoir ressortir une anecdote, parce qu’elle serait tellement altérée qu’elle en perdrait toute son essence, et aussi parce que même par omission de certains détails, cela reste une forme de mensonge, et que je n’ai pas toujours la foi de le faire.

Être invisible concernant sa transidentité, c’est aussi faire une croix sur le fait de montrer des photos de nous quelques années auparavant, ou juste lorsque l’on était enfant justement. Quelque part, c’est donc sacrifier une majeure partie de sa vie et de ses souvenirs, par sentiment de sécurité personnelle.
Choisir d’être stealth, c’est un effort constant, d’énormes sacrifices, et beaucoup de censure verbale.

Du coup, quand des gens essaient de m’expliquer que les personnes trans qui font le choix d’être invisibles, sont des traîtres à la cause, qui ont pris la voie de la facilité, et qui sont juste des planqués profitant des privilèges d’un système binaire oppressif, j’ai un peu envie de leur cracher au visage.

Tout le monde ne souhaite pas faire de sa vie quotidienne un combat politique de tous les instants, des fois, nous voulons juste vivre, le plus simplement du monde, comme n’importe qui d’autre.

(Matteo Pugliese)

Journal de Vitamine T #1

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Bien le bonjour !
Suite à mon appel à témoins qui s’est rapidement transformé en superbe shitstorm des familles, j’ai décidé de rater la date anniversaire afin de laisser un peu le temps à cette thématique de refroidir, et de me baser principalement sur mon vécu, histoire de ne pas exotiser qui que ce soit si ce n’est moi. Malgré le méchant sous entendu comme quoi j’organisais un freak show, moi j’aimais à me dire qu’entre monstres, c’est plus sympa à plusieurs. Mais passons, parce que la médisance a ses propres limites, et que je suis plus mature que ça. Ah et je voulais néanmoins remercier les quelques personnes à avoir bravé la tempête pour m’envoyer leur témoignages, je ne m’en suis pas servi au sens le plus strict du terme, mais c’etait un bon post-it de départ, donc merci à vous !

Aujourd’hui donc, cela fait plus d’un an et demi que je suis sous traitement hormonal de substitution. Une fois les confettis balayés, j’ai décidé de faire un petit retour sur tous les changements physiques que j’ai rencontré jusqu’ici. Des plus évidents comme ceux auxquels on ne pense pas vraiment. Du surprenant, de l’improbable, du classique. Bref, je vais les énoncer de bas en haut, par rapport à mon corps, parce que c’est toujours en partant du bas qu’on remonte mieux la pente ! Et cette allégorie sonnait vachement mieux dans ma tête tiens.

Zone basse

Ça peut paraître con, mais j’ai vraiment vu mes pieds changer. Une des idées les plus répandues, voire attendue, c’est que la testo fait grandir les pieds, parce que les cartilages s’épaississent et tout ça. Alors, faisant moi même un 43 fillette dès le départ, j’avoue que ça m’aurait emmerdé. En revanche, j’avais des pieds patates, plutôt ronds, sans la moindre aspérité, et à présent ils se sont affinés, voire dessinés. Les veines ressortent vachement, la zone avant les orteils est plus anguleuse, bref, je ne remplis presque plus mes rangers dans le sens de la hauteur. Et ça a même altéré ma démarche, puisque j’ai à l’origine les pieds plats, ceux ci s’étant amincis, mon généraliste et moi avons pu nous rendre compte que j’avais tendance à mordre vers l’intérieur du pied, et du coup j’explose mes baskets bien plus vite, ce qui est en soi, assez nul.

Mes mollets se sont également un peu plus dessinés, il faut savoir que c’est une de mes plus grandes fiertés, ils sont massifs, au point que je ne rentre pas dans la plupart des modèles de bottes, ce qui est naze ça par contre. Mais, même sans forcément les contracter, ces deux blocs sur mes jambes commencent à laisser paraître la ligne de séparation entre la fin du mollet et la jambe, ce qui me met particulièrement en joie.

Zone intermédiaire

On parle souvent de la pilosité croissante comme effet principal de la testo, mais là où on ne m’avait pas prévenu, c’est que ça pousse à des endroits aléatoires. C’est à dire que les endroits pré-existants ne se contentent pas d’en fournir plus, mais la pousse des poils démarre également sur des zones vierges initialement. Genre, l’intérieur des cuisses. Franchement celui là je ne m’y attendais pas spécialement, mais ça me fait sourire parce que c’est comme du poil nouveau né, il est super doux tout en étant déjà très épais.
Mais sinon, comme convenu, là où il était déjà présent, il ne fait pas semblant non plus. Mes cicatrices se voient vachement plus du coup, heureusement que je n’en ai pas honte.

Un effet qui en revanche ne m’avait pas été annoncé et qui est un de ceux qui m’a le plus étonné, attention on va parler intimité, mais c’est l’odeur de mon pipi. Je me rappelle distinctement d’un matin réveil où, allant directement faire mon business aux toilettes après m’être jeté du lit, j’ai dû plisser le nez et renifler frénétiquement quelques instants en quête de l’identification de cette odeur inconnue.
Spoiler alert: ça venait de moi, et je ne m’y attendais vraiment pas.
C’est assez amusant de constater que l’odeur corporelle passe réellement par le taux hormonal. Je prends un peu d’avance sur la zone suivante mais, la transpiration aussi change de « tonalité olfactive », plus renforcée, pas forcément plus désagréable, seulement différente, moins légère. C’est difficile à expliquer je dois l’avouer. Mais vous avez l’idée générale. Et je fais partie de ces personnes qui ont un pif tel, que toute odeur est fortement attachée à son origine. Du coup, si les gens ont une odeur rattachée à leur identité, quand la mienne s’est altérée, ça a été un choc, et il m’a fallu un certain temps d’adaptation. J’ai même préféré changer de marque de déodorant, pour réellement faire une distinction, à la fois mentale, et à la fois dans mon nez.

Et je vais m’arrêter là pour la zone intermédiaire, parce que s’il y a eu d’autres changements effectifs, je ne souhaite pas en parler, par préservation de mon intimité réelle. Les forums sont là pour ça si la curiosité vous démange, car les réponses ne seront pas ici aujourd’hui.

Zone du Buste

Là encore, des poils en veux tu en voilà. Même si tu n’en veux d’ailleurs pas, personne ne t’as demandé ton avis. Genre sur les épaules, ou dans le dos. Au secours.
Mais sinon j’attendais de pied ferme les muscles sans rien bosser particulièrement, comme on peut le lire dans un post sur trois sur les groupes FTM, sauf que c’est un gros mensonge. Enfin, en ce qui me concerne particulièrement. J’ai l’impression que mes épaules ont légèrement bougé, mais c’est subtil, j’ai aussi très légèrement perdu en souplesse latérale, j’ai un peu plus de mal à me retourner en étant debout par exemple, mais c’est peut-être juste parce que je suis gros, bref, mystère.

En revanche, j’ai noté que la texture de ma peau a très légèrement bougé. Très légèrement, mais un peu quand même. En fait, suite à une méchante brûlure au soleil de quand j’étais enfant, j’ai gardé un espèce de « grain » de texture sur la peau au niveau des épaules. Et avec la testostérone, j’ai remarqué que mes bras auparavant tout doux, commençaient à doucement reproduire cette texture. J’ignore encore jusqu’à quel point ça devrait se rejoindre, pas trop j’espère, mais cela reste un détail amusant.

Ah j’allais oublier, j’ai pas mal perdu de hanches ! Mais le gras n’a pas disparu, il s’est juste déplacé. Nul. Du coup j’ai moins de formes sur les côtés, mais j’ai gagné de la bedaine, et l’ensemble est descendu très légèrement. Je vous épargne les photos comparatives mais, si mon gras de ventre était avant disséminé tout autour du bassin, maintenant le tout s’est concentré vers l’avant, et donc, vers le bas. Joie. Pas merci Newton.
J’ai également un peu fondu au niveau des fesses, je le sais parce que je flotte dans tous mes pantalons qui auparavant épousaient parfaitement le rond de mon fessier, et maintenant, ce n’est pas plat non plus, mais c’est moins rempli. Et c’est un peu chiant parce que je ne comptais pas en racheter dans l’immédiat. Tant pis, on fera avec.

Zone du Visage

Outre l’évident début des hostilités concernant la barbe et son éventuelle vitesse de pousse plus ou moins inégale, il y a clairement un changement visible sur ma face. Plusieurs en fait. Le premier, et celui qui me génère une quantité non négligeable d’angoisse, c’est la ligne des cheveux qui recule. Je vous ai mis ci-dessous deux photos ayant deux ans et demi d’écart, et des pattes se sont clairement dessinées au fil du temps, entre le front et les tempes (si quelqu’un connait le nom exact?).
J’ai également longtemps trouvé que mon nez avait changé, je trouvais qu’on aurait plus dit une patate écrasée qu’avant. Mais en farfouillant mon dossier photo, il s’avère que la patate qui me sert de pif n’a au contraire pas bougé depuis mes 3 ans. En revanche, j’ai l’impression que l’arête surplombant mes narines s’est un peu plus dessinée. Mais ça vient peut-être juste de la luminosité des photos, ou du fait que je ne me scrutais pas autant sous toutes les coutures avant d’entamer ma transition. De la même façon, j’ai l’impression que ma mâchoire ainsi que mon menton se sont subtilement renforcés, mais là aussi, c’est subtil.

Du reste, mes cheveux poussent toujours beaucoup trop vite, et ma barbe est très capricieuse dans ses décisions de zones de repousse, avec des creux distinctifs se formant au fur et à mesure. Mais tout ça n’est que le début, après tout, un an et demi ce n’est pas beaucoup.

COUCOU FUTURE CALVITIE.

CONCLUSION

La testostérone, et le traitement hormonal en général, ce n’est pas à la carte, bien malheureusement. On ne choisit pas les effets qu’on désire pour esquiver les effets nuls, ou simplement que l’on ne souhaite pas pour soi.
Je ne veux pas faire l’oncle relou et moralisateur à vous dire « les hormones c’est sérieux, faisait pas n’importe quoi ». Mais en vrai, ne prenez pas ça à la légère, y’a de vrais impacts sur le corps, en interne, que je suis incapable de mesurer à mon échelle. Donc gerez pas ça seul·e, mais de préférence avec un médecin, même un généraliste ça fait le job. Juste, pas trop à la sauvage, parce que ça peut mettre votre vie en danger. Mais je ne suis pas là pour juger après tout.

Bref. Prenez bien soin de vous, et à la prochaine !

Celui dont on ne doit pas prononcer le morinom

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Le morinom, est une très astucieuse francisation de ce qu’on appelle plus souvent le « deadname ». C’est un terme désignant le prénom de naissance d’une personne trans. Cet article y sera consacré.

Pour la plupart des personnes trans, devoir entendre son prénom de naissance est d’une violence inouïe, et une grande source de dysphorie et d’angoisse. Si on dit souvent que les mots ont du pouvoir, les prénoms en portent un d’autant plus important. Parce qu’ils sont rarement denués de sens, et c’est notamment pour cela que le choix de son prénom dans un parcours de transition est une étape clé.
Certain·e·s vont mettre du temps, en essayer plusieurs avant de trouver celui qui leur conviendra pour la vie. Tandis que d’autres personnes, vont savoir immédiatement lequel adopter.

Le problème avec le deadname, c’est qu’il peut donner l’impression à certain·e·s d’entre nous, que peu importe qui nous devenons et à quel point nous avons changé, le passé parviendra toujours à nous hanter, relativement intensément. De ce fait, de nombreuses personnes trans s’affairent à plus ou moins grande échelle à faire disparaître toute preuve de cette identité passée, quitte à y perdre des souvenirs irremplaçables, comme des photos par exemple. Parce qu’il s’agit de laisser pour seule trace l’identité réelle, et non pas celle de naissance. On ne peut pas effacer la mémoire des gens, mais on peut leur laisser le souvenir de qui nous sommes ultimement, plutôt que celui de qui nous avons pu être.
C’est une sensation très étrange et très désagréable que d’être confronté à son passé. D’autant plus quand on a eu la sensation de vivre dans un mensonge permanent depuis de longues années.

J’ai passé deux heures de ma nuit à évacuer les vieilles photos de mon ancien compte FB, et c’était vraiment un moment malaisant. Je ne me reconnaissais sur aucune des photos. J’ai certes pas mal changé physiquement au cours des deux dernières années, mais tout de même, j’ai passé bien 10 ans de ma vie avec la même tronche, malgré les aléas de la prise de poids, je me voyais tous les jours devant le miroir.

Et pourtant, c’était un instant dans ma vie vraiment pas agréable, que de trier toutes ces photos. Être ramené violemment en arrière dans ce tourbillon de mal-être, alors que ma vérité est toute autre. Ma vérité, ce n’est pas là d’où je viens, mais ce qui m’a construit pour en arriver jusqu’à aujourd’hui, et si la différence peut sembler subtile, elle est capitale.

Quand on me demande de prononcer mon deadname, ou que je l’entends, ou le lis, j’ai l’impression d’être extirpé violemment de ma bulle présente pour replonger dans les tréfonds de ma souffrance passée.

Je ne dis pas que toutes les personnes trans sont aussi mal à l’aise avec leur prénom de naissance, pour preuve certaines décident de simplement masculiniser ou féminiser celui-ci pour continuer à le porter, ou s’en foutent. Mais ce n’est pas mon cas, et encore une fois, je ne parle qu’en mon nom.
Avant même que je ne comprenne d’où venait la douleur que je portais depuis ma puberté, je détestais mon prénom de naissance. Il ne m’allait pas, il n’était pas horrible, mais ce n’était pas mon identité, même si cela en faisait, en quelque sorte partie.
Celui que je porte aujourd’hui, je l’ai choisi avec soin, il me convient, c’est le mien. C’est lui mon vrai prénom, pas celui qu’on m’a collé quand je suis né.

Pour conclure, la relation d’une personne trans à son prénom de naissance peut être autant paisible que conflictuelle, mais dans le doute, ne lui posez pas la question, histoire de faire preuve d’autant de respect que de décence.

Laugh while I choke

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Assez fréquemment, on m’a demandé plus ou moins directement quel genre de « fille » j’ai été. Parce que cela se base sur la conception fausse comme quoi je suis « devenu » un garçon. Même si je n’arrive pas bien à placer sur la frise chronologique de ma vie, oui comme en CE2; le moment où je le suis miraculeusement devenu. Quand j’ai fait mon coming-out? Là comme ça, paf? Ou bien à la seconde où la seringue pleine de testo a pénétré mon muscle fessier?
Franchement je me demande à quel moment les gens le situent exactement, parce que oui moi je trouve ça drôle de penser que la seconde d’avant j’étais une fille, et BOUM, garçon instantané, ouais, comme les nouilles lyophilisées.

Mais bref, inspiré aujourd’hui par une vidéo de Jammidodger, j’ai décidé d’un peu vous raconter comment j’ai vécu ma vie de prétendu nana, et ce que ça m’a possiblement apporté.
Il y aura peut-être des répétitions vis à vis d’articles antérieurs, mais après tout, je n’ai pas changé de vie entre temps. Mais je tenais néanmoins à l’écrire ici une bonne fois pour toutes, afin d’avoir d’un seul trait, une histoire que je vous dispose en filigrane depuis un moment déjà.

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Quand j’étais enfant, tout allait à peu près, bon, je n’avais pas vraiment d’amis, j’étais déjà persécuté à l’école, et je jouais bien souvent dans mon coin. J’ai même essayé d’avoir un ami imaginaire, mais je n’y suis pas vraiment parvenu, au fond de moi, je n’y croyais pas sincèrement, du coup cela ne fonctionnait pas.
Arrivé à l’adolescence, vous connaissez déjà probablement l’histoire, toujours quasiment aucun ami, alors j’ai essayé de faire semblant d’être normal pour m’intégrer.
Je dis « normal », parce que j’ai toujours pensé que j’etais bizarre, même si je ne savais pas vraiment trop pourquoi. J’ai donc commencé à traîner avec un groupe de nanas qui faisaient de l’équitation ensembles, mais c’etait vite chiant de faire semblant de m’intéresser à des trucs qui m’effleuraient à peine. Du coup arrivé en début de 4e, j’ai élargi mon champ de recherches pour finir par tomber sur une nana aussi « bizarre » que je pouvais l’être, on s’entendait bien. J’ai même déclaré ma flemme à un garçon d’une autre classe, la même année, son nom n’est pas important, mais c’était un abruti. Notamment parce que dès le lendemain, il sortait avec ma nouvelle amie. Mais bref. On va dire que péripéties péripéties, et on va faire avance rapide jusqu’à ma majorité.

Comme vous le savez peut-être déjà si vous me suivez depuis un certain temps, faute de repères, et en ayant pleinement conscience de ma différence face aux autres sans vraiment réussir à en trouver l’origine, j’ai bâti une grosse partie de mon identité sur mon homosexualité. Ça me donnait notamment une belle excuse pour ne pas faire trop d’efforts pour me pousser du côté de la féminité.

En revanche, les autres prenaient un malin plaisir à me la rappeler, cette absence de féminité, puisque quand j’avais encore les cheveux longs, me voir les détacher relevait de la « victoire » pour elleux, pareil lorsqu’il s’agissait de me forcer gentiment à enfiler une robe ou une jupe. Je l’ai fait une fois ou deux, pour faire plaisir à mes potes essentiellement, mais rarement plus de 15 minutes parce que les blagues les plus courtes et tout ça.

Alors ouais, j’ai expérimenté, des fois j’ai essayé de me coiffer « comme une fille », ou de mettre du maquillage (mon talent se limitant au crayon noir et au vernis), ou encore de la lingerie plutôt jolie. Mais pendant tout ce temps, je n’étais jamais complètement à l’aise, jamais entièrement confortable avec mon image, celle que j’avais comme celle que les gens projetaient sur moi.
Je sais d’ailleurs bien que les vêtements ne devraient pas avoir de genre, mais je sais aussi pertinemment dans quel contexte on évolue actuellement.

Dans tous les cas, nous pouvons constater que si j’ai bien pris mon temps avant de comprendre, c’etait aussi que je n’avais absolument pas conscience que les mecs trans existaient. C’est un peu comme quand j’avais 13 ans et que j’ai découvert que l’homosexualité c’était un vrai truc (merci t.A.T.u. – toi même tu sais). Et à partir du moment où j’ai eu connaissance de ce qu’était la transidentité, il m’aura fallu à peine moins de 3 ans avant que ça ne m’explose au visage.

Je suis passé par toutes les phases du deuil avant de commencer à me bouger les fesses pour régler cette question.
Le déni tout à fait classique, je ne veux pas que ça me concerne alors ça ne me concernera pas. La colère parce que merde, qu’est-ce que j’ai fait pour mériter d’être différent au fond? J’ai essayé de négocier avec moi-même sur l’aspect temporel, allez, promis, on s’en occupe pas avant 10 ans, bisou. La dépression post négociations, même si j’ai l’impression que la dépression c’était clairement l’entièreté de ma vie les 12 années précédentes qu’autre chose.
Et enfin, loués soient les dieux, la glorieuse et brillante acceptation. J’aurais pris super cher pendant ces trois années, à y penser jour et nuit, bien malgré moi, même si je n’étais pas au bout de mes peines en vrai.

Donc voilà. Je ne suis pas subitement devenu un garçon, touché par la grâce du jour au lendemain. Émotionnellement, mentalement, physiquement, ça a été un long chemin, que je n’ai non seulement pas parcouru tout seul, mais que je foule encore actuellement. Et ce que je souhaitais notamment mettre en lumière aujourd’hui, outre le fait de pouvoir vous conter l’histoire de bout en bout, c’est que même si j’ai tenté de m’intégrer en tant qu’individu féminin, ça n’enlève rien à mon identité de garçon, ça ne fait qu’éventuellement appuyer ma souffrance durant ce long périple qu’est la découverte de soi.

Merci à tou·te·s de votre attention, et aussi de votre soutien, et de l’amour que vous avez pu m’apporter depuis tout ce temps, plus ou moins long selon chacun.
La route de ma vie est encore longue, je le souhaite de tout coeur, et j’espère que vous serez encore là à mes côtés demain.

Show me how good you are

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Oui, c’est bien Ken.

Aujourd’hui, je risque ne pas me faire d’ami·e·s avec une opinion bien arrêtée.
Avant toute chose, sachez que j’ai pleinement conscience que chacun vit sa masculinité comme il l’entend, et que si cela inclus de la vivre de façon stéréotypée, c’est un choix comme un autre qu’il faut respecter.

Cependant, je souhaitais aussi prendre la défense des manières qui vont à l’encontre de ces stéréotypes. Toutes les masculinités sont valables, à l’exception de celles qui sont clairement établies comme toxiques et mauvaises vis à vis d’autrui. Mais on va se concentrer sur celles qui se limitent à un impact uniquement personnel.

Je regardais plus tôt dans la journée, une vidéo qui parlait de méthodes pour combattre la dysphorie quand on est FTM, et certains points m’ont un peu fait grincer des dents.
Le rappel constant de faire usage de produits inutilement genrés, comme les vêtements ou les déodorants m’a un peu gêné.

Dans l’ensemble la vidéo était bienveillante, ce n’est pas l’auteur ou ses intentions que j’attaque. En revanche si le fond était bon, la forme m’a un peu dérangé à cause de certaines maladresses.

Mais si le temps que j’ai passé sur les groupes ftm m’a appris quelque chose, c’est que certaines choses sont genrées vraiment inutilement. Comme la nourriture, ou les produits d’hygiène. Je n’exagère pas.
Je me souviens distinctement m’être fait engueuler pour avoir remis en cause le « manly meal », commenté sous une photo de plat à base de viande rouge et de bacon. Je me suis donc fait traiter de sale vegan extrémiste, pour avoir critiqué le fait que la salade n’est pas réservée qu’aux filles.

Qu’est-ce qui fait que l’on est un garçon? Porter des vêtements de garçon? Limiter le maquillage ? Se nourrir de viande? Avoir un pénis?
Si vous avez répondu non à toutes ces questions, ding ding, c’est que vous avez bon.
Ce qui fait qu’on est un garçon, c’est que l’on se sent garçon par essence, dans son cœur et dans son cerveau. Que l’on ait des hanches larges ou qu’on porte des culottes affriolantes, en mangeant des chocapics, les yeux pleins de liner, ne font pas moins de nous des garçons.

Je ne serais jamais un mâle dominant, non pas parce que je suis dénué des attributs physiques pour y prétendre, mais parce que je n’en ai aucune envie.
Je reste quoi qu’on en dise, un garçon, même si je pleure devant Le Roi Lion.

Et mon point du jour est assez simple. Si il y a des personnes trans masculines qui me lisent, sachez que vous n’avez rien à prouver à personne. Vous n’avez aucunement besoin de vous conformer à des stéréotypes de genre si vous n’en avez pas l’envie.
Il est inutile de rouler des mécaniques et de regarder le foot si cela ne vous intéresse pas. Il n’est pas indispensable de mettre des bermudas à motif camouflage et vous empêcher d’avoir des émotions pour être valables en tant qu’hommes.

Il y a autant de types de masculinités qu’il y a individus masculins. Chez les personnes cis comme chez les personnes trans.
Soyez qui vous voulez, rien ne vous retient de vivre bien comme vous l’entendez.

Et ceux qui vous diront le contraire sont des ignares. Voilà.

I will summon you

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*BOOP*

C’est amusant quand même, la vitesse à laquelle les choses évoluent, d’un point de vue individuel. J’ai à peine fêté mon 1er manniversaire, que je constate déjà ne plus considérer certains détails de la même façon.

Au début de mon parcours de transition, au moment de mon coming-out plus précisément, je tenais à ce que tout le monde soit au courant, pas nécessairement de ma transidentité, mais du fait qu’il fallait me genrer au masculin. Et de ce fait, les gens additionnaient 2 + 2, et ça faisait automatiquement de moi une personne trans.

A présent, l’approche est plus délicate. Je ne prends pas la peine d’expliquer aux nouveaux gens que je rencontre, que je suis un garçon, parce que ça se voit sur ma gueule, il n’y a aucun doute sur la question. Mais je ne précise pas forcément que je suis transgenre. Parce que je ne juge pas cela utile. Et parce que je considère que mon passé n’appartient qu’à moi, et que ça ne regarde pas les gens de savoir ce que contiennent mes boxers.

Et du coup, c’est un exercice de subtilité au quotidien, en particulier en soirée, quand je discute avec des inconnu.e.s, d’avoir des réponses qui me viennent automatiquement aux questions qui sonneraient presque comme des reproches.

Quoi? J’ai bientôt 26 ans et à peine trois poils au menton? Ouais, mais j’ai eu une puberté tardive.
Comment? Tu as entendu que mon ami.e parlait de mon traitement? Oui, j’ai un dérèglement hormonal, rien de bien grave, mais j’ai besoin d’un supplément en testostérone pour éviter les inconvénients liés à ce déficit.
Hein? Comment suis-je aussi renseigné sur les règles? Bah, j’ai deux sœurs moi tu sais, dont la plus grande avec seulement deux ans d’écart, forcément, même sans le vouloir, tu en apprends des choses sur le sujet.
Tu dis? Pourquoi j’utilise la cabine plutôt que la pissotière? Question d’habitude, je préfère m’asseoir, je trouve cela nettement plus confortable. (merci Wolf pour celle là d’ailleurs)

Bref, tout un tas de situations où il m’a fallu créer des automatismes verbaux, par souci de « sécurité », et surtout histoire de me rassurer de ne jamais être « révélé » au grand jour et subir des remarques désobligeantes (car il y en a).

De ce fait, je profite pleinement de la quiétude de mon cispassing, non sans cette angoisse perpétuelle de « griller » ma situation, un peu comme si j’étais un espion sous couverture, au pays des mecs cisgenre.
Et du coup, lorsque des personnes rencontrées depuis moins d’un an, comprennent que je suis trans, il s’en suit toujours une ribambelle de remarques pas toujours très safe, dont je vous ferais bientôt part dans un second épisode de Florilège.

Mais là où je voulais arriver, c’est que je n’aime pas qu’on me colle immédiatement cette étiquette de LE MEC TRANS™, et que les individus ne retiennent uniquement que ça de moi. C’est aussi blessant que réducteur. Je vous remercie donc de ne pas le préciser, me concernant ou concernant d’autres personnes trans. Parce que je l’ai déjà vécu, qu’après avoir discuté avec des inconnu.e.s, mes ami.e.s pensent pertinent de préciser ma situation identitaire à ces inconnu.e.s., et ce n’est vraiment, mais alors vraiment pas indispensable.

Bref. Prenez soin des gens que vous aimez, dites leur que vous les aimez, et ne les outez pas gratuitement.
Merci !

When you believe

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coolchristqa6

J’y ai souvent fait référence, mais quand j’étais enfant, ma mère était Témoin de Jéhovah. Et je voulais aujourd’hui, revenir un peu sur ce que ça impliquait, parce qu’on entend tout et son contraire sur le sujet. Je parlerais de « TJs » dans cet article, par souci de simplicité.

Un truc que j’ai beaucoup entendu étant petit, c’est que ce que l’on ne connait pas ne peut pas nous manquer. Je tends à être convaincu du contraire. Même sans savoir ce qu’impliquait fêter son anniversaire par exemple, j’effleurais quand même du bout des doigts ce que cela représentait. L’argument principal du pourquoi on ne le fête pas chez les TJs, et accrochez vous bien parce que c’est du gros gros flan : c’est qu’en fêtant son anniversaire, on est mis sur un piédestal, or c’est là la place de Dieu, et nous devons rester humbles. Donc pas de gâteau, pas de bougies, pas de chanson, pas de cadeaux.
Même si j’en suis sorti il y a longtemps, ça a laissé certaines traces, par exemple je suis tout spécialement mal à l’aise en entendant la chanson « joyeux anniversaire ». Je suis incapable de la chanter, et j’arrête promptement les gens quand ils essaient de me la chanter.

Vous allez me dire, pourquoi ne pas me rebeller plus tôt ? Pourquoi me suis-je laissé entraîner dans ces conneries jusqu’à mes 14 ans ? Quel a été l’élément déclencheur ?

Etant à l’époque socialement considéré comme une fille, le fait de moi-même avoir un crush sur une autre fille m’a fait réaliser que quelque chose clochait. Et c’est seulement à ce moment là que j’ai souhaité m’éloigner de la religion de ma mère pour commencer à réfléchir par moi-même. Bon bien évidemment, j’ai d’abord considéré être profondément un monstre pendant deux ans, et ça a été très dur. Parce que si j’étais déjà habitué à être différent des autres enfants, je n’avais jamais eu le besoin de vivre dans le mensonge vis-à-vis de ma famille.

Parce que les TJs c’est ça : l’isolement. Avec un programme étalé sur la semaine avec au moins deux réunions de 2h, plus l’étude de livre, et l’espèce de parrainage éducatif religieux dont j’ai perdu le nom, plus la prédication le weekend (quand ils viennent faire chier au porte à porte vous savez). Ça fait déjà au moins 5 jours dans la semaine où tu consacres quelques heures de la journée à cette religion. Et mine de rien, avoir une action quasiment quotidienne relative à une pensée religieuse, ça te force implicitement à centrer ta vie autour de ça. Surtout quand tu es jeune, et que tu es particulièrement sensible au regard que l’on te porte, et affecté par la pression de la congrégation (groupe de TJs local si vous préférez).

Parce qu’à force de côtoyer les mêmes personnes plusieurs fois dans la semaine, tu crées du lien, tu t’attaches plus ou moins à certain.e.s, et tu accordes du crédit à leur opinion à ton égard. Et c’est là que ça devient dangereux. Parce que eux c’est des adultes, établis depuis longtemps dans leur foi, et que leur avis est conséquemment influencé par cette religion. Et que tu as conscience que le moindre écart de ta part, t’apportera des mauvais points de réputation, non seulement à toi, mais surtout à ta famille. Et tu ne veux pas être la source de honte de ta maman.

Etre TJ, c’est avoir une sur-conscience de sa réputation, devoir faire gaffe à tout un tas de trucs qui pour les non-TJ sont bénins. Je ne vous parle pas de trucs genre avoir des rapports hors mariage ou prendre de la drogue hein, non, des trucs bien moins graves, comme fumer des cigarettes, boire de l’alcool, ou flirter. Parce que flirter c’est le premier pas glissant vers la fornication, pour finir par aller en enfer tout ça.

Et respecter Dieu passe par tout un tas de trucs tous plus absurdes les uns que les autres. Du genre ne pas lire certains contenus, ou voir certains films. Par exemple, quand le premier Harry Potter est sorti au cinéma, ma maman a refusé de signer l’autorisation de sortie de l’école, parce que la magie c’est de la sorcellerie, et la sorcellerie c’est pour les engeances du démon.
Autre exemple : les Schtroumpfs, j’avais la collection quasiment complète. Ma maman a fait un grand feu avec les BDs, à l’arrière du jardin, parce que c’est des petits lutins bleus démoniaques, et que Gargamel fait allusion à Satan. J’avais à peine 10 ans.

Je parlais plus haut de l’isolement. Quand j’étais enfant je n’avais pas vraiment d’ami. Parce que j’étais « bizarre ». Parce que les croyances de ma mère influençaient mes choix, quand il y avait un anniversaire d’un camarade fêté en classe, personne ne me surveillait pour être sûr que je ne m’implique pas dans les festivités. Parce que je m’éloignais de moi-même de toute forme de participation. Parce que j’avais la trouille que ma maman ne l’apprenne. Donc je restais au milieu des autres élèves, qui chantaient, mangeait du gâteau, partageaient les bonbons. Et moi j’attendais que ce soit fini, patiemment. Des fois j’allais même dans le couloir entre les salles de classe, à lire un livre en attendant que ça se termine.

J’étais trop petit pour être réellement croyant, mais j’avais le cerveau suffisamment brainwashé pour me tenir à carreau de moi-même. J’étais même capable de réciter des arguments appris par cœur au pourquoi je ne fêtais pas mon anniversaire, ni celui de quelqu’un d’autre.

Je me sentais effroyablement seul à l’époque. Les autres enfants se moquaient de moi, pour tout un tas de raisons, mais surtout parce que j’étais différent d’eux. Du coup, aller aux réunions des TJs, c’était me retrouver entouré de personnes qui, j’en étais convaincu, comprenaient ma différence, étaient comme moi, étaient là pour moi. Même si je savais qu’au moindre écart de comportement, ils me tourneraient le dos.

Je mentirais en disant que je n’en ai rien retiré de bon. Sur la théorie, grandir entouré par les TJs m’a apporté certains codes de conduite, certaines valeurs, certains alignements moraux.
Mais je mentirais aussi en disant que je n’en ai retiré que du positif. Ça m’a aussi construit en étant criblé de doutes, d’angoisses, de manque de confiance en moi et de la crainte du regard d’autrui.

Si je voulais écrire ce pavé imprévu aujourd’hui, c’est parce que j’estime que j’en ai besoin. Il existe déjà une foule de témoignages de personnes ayant grandi chez les TJs, mais je voulais apporter le mien, pas pour justifier quoi que ce soit, mais parce que ça me libère un peu, quelque part.

_

PS : Merci de ne pas cracher sur ma maman dans les commentaires, elle a fait des erreurs, elle en a pris conscience, je lui ai pardonné depuis. Et elle est même un soutien familial dans ma transition. Donc elle aussi, elle a grandi.

I won’t think twice

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Joyeux Automne.

Joyeux Automne.

Ces derniers temps, je suis partagé. Partagé entre ma raison et mes envies.
Pour prendre un exemple concret, j’ai envie d’être tout tatoué. Parce que d’un côté, je me dis que je n’ai pas tant de temps à vivre que ça, et ce n’est pas comme si j’avais un travail bientôt.
Mais d’un autre côté, je sais que je ne vais pas claquer demain dès l’aube, et que peut-être qu’un jour je me déciderais à faire un truc de ma vie. Un truc qui paie les factures j’entends. Je ne pourrais pas décemment rester aux crochets de la société ad vitam æternam.

Au final, tout n’est qu’une question de patience. J’ai seulement 25 ans, et les tatouages, j’aurais bien le temps d’en faire au cours de ma vie.

C’est un peu comme pour ma transition, j’en ai encore pour plusieurs longues années avant d’obtenir le résultat que je veux. Hier je fêtais mon 5e mois de traitement, et je suis physiquement plus avancé que d’autres garçons dans le même cas de figure. Mais je ne suis pas les autres. Moi je n’ai aucune patience justement, et je voudrais déjà tout plein de poils sur la face, alors qu’en réalité je n’en ai pour le moment pas tant que ça. Même si je sais que pour 5 mois de vitamine T, j’en ai déjà beaucoup. Mais je suis avide, moi. Je ne trouve pas ça suffisant.

En revanche, je ne suis pas raisonnable, je voudrais les avantages sans les inconvénients. Parce que si la pilosité fait surface, les à-cotés de la puberté aussi. Et mon acné est douloureuse. Pas seulement psychologiquement. Je n’avais pas souvenir que les boutons faisaient aussi mal quand j’étais ado. Mais là encore, je ne me souviens que de ce qui m’arrange je suppose. En toute sincérité je ne m’en rappelle pas vraiment. J’étais trop occupé à  devoir gérer avec ma vie, alors en chantier. La dépression, le harcèlement, tout ça tout ça. Je n’ai pas spécialement pris de notes sur le degré de souffrance des trois boutons que j’avais sur la gueule.

Mais bref. Je ne sais pas où va cet article aujourd’hui, nul part je suppose. Juste un petit défouloir verbal, parce que j’en avais besoin.
Merci de votre attention, et à très vite pour des articles de meilleure qualité.